Mardi 25 Juillet - Livre de bord - Extraits
0h30 : Gros grain. Roulé le génois à 50% et empanné l'artimon.
4h10 : Ça mollit. Déroulé le génois.
4h20 : Batteries faibles, vent faible. Moteur.
8h30 : Stop moteur et hissé la misaine.
9h30 : Pétole. Remoteur.
11h15 : Bâbord amure, grand largue, petite brise. Déroulé le génois et tangonné au vent. Stop moteur.
14h30 : Enlevé le tangon, génois sous le vent, grains.
15h30 : Remis le génois tangonné au vent.
21h : Encore une nuit qui s'annonce "paisible" (ou pénible !). Vent fraîchissant. 3 nœuds par le travers bâbord. Affalé la misaine, enlevé le tangon, génois sous le vent roulé à 50%, 1 ris dans l'artimon.
23h : Ça fraîchit encore, environ 35 nœuds ou plus, 2 ris dans l'artimon, et roulé le génois à 70%.
23h20 : Faisons confiance au GPS... Nous sommes dans le passage du Lakemba !
L'alizé avait été trop doux avec nous jusqu'alors, et l'étape entre Bora-Bora et la Nouvelle-Calédonie ne fut pas aussi tranquille que les précédentes... Avis aux navigateurs, le Pacifique n'est pas si paisible que ça dans le coin ! Nuit et jour, les manœuvres ont succédé aux manœuvres, et Bruno est devenu un as du tangonnage-détangonnage express. Le vent était irrégulier, mais plutôt fort, et de gros grains fréquents arrivaient sans crier gare, nous obligeant à réduire la voilure en catastrophe, au beau milieu des repas ou des siestes. Nous avons même terminé le parcours au près ! Grand voile arisée et génois enroulé à moitié, Ilboued gîtait et tanguait dans des vagues bien formées. Les températures devenaient fraîches, autour de 20°C, et nous avons dû ressortir sweat-shirts et pantalons pour les derniers quarts de nuit. La mer était plus grosse que belle, nous obligeant à ranger soigneusement le moindre objet qui n'était pas en service. Mais malgré notre vigilance, nous avons réussi à casser quelques verres, à ramasser plusieurs fois tartes et autres salades sur le pont, et nous avons dû renoncer à ranger les cassettes du bord dans les étagères prévues à cet effet. Les sangles antiroulis ne résistaient pas aux chocs que la mer nous infligeait !
Même la navigation ne nous laissait pas de répit. Il fallait slalomer entre des îlots positionnés à 2 milles près sur les cartes marines, des zones incertaines indiquées en pointillés, et des hauts fonds, indices d'une activité volcanique récente !
Mais la petite vie du bord continuait ! Christine était avec nous pour l'étape. Peu expérimentée en grande navigation, et peu gâtée par les éléments extérieurs, elle a pourtant fait face à l'adversité avec une belle sérénité, et est passée progressivement de longues siestes méditatives en position allongée sur sa couchette à des parties acharnées de scrabble dans le carré. L'équipage s'est montré à la hauteur de la situation, avec quand même avouons-le quelques tout petits moments de faiblesse. Christine, un peu barbouillée au début, Brigitte un peu cafardeuse qui savourait ses derniers jours de mer avant longtemps... Mais Bruno était là, pour veiller au bon moral des troupes et raconter quelques bonnes histoires au coucher du soleil !
Et puis, la période était faste pour mettre les petits plats dans les grands, le 14 Juillet, la Sainte Christine, la Sainte Brigitte, l'anniversaire des un an de voyage, la mi-route entre Groix et Groix... Heureusement qu'il n'y avait rien de spécial à fêter le 27 Juillet, car pour nous cette journée n'a pas existé ! Au passage du méridien 180, nous avons brutalement vieilli de 24 heures, sans nous en rendre compte. Notre fidèle GPS en a été lui aussi tout remué et affichait des vitesses exceptionnelles de plus de 500 nœuds.
Les baleines et les dauphins nous ont encore boudés pendant l'étape, mais malgré tout, nous avons remonté à bord la plus belle dorade du voyage jusqu'à maintenant, 1m40 au garrot, et quelques bocaux à savourer, stockés dans les fonds.
À la BLU, de nouveaux copains sont arrivés sur les ondes. Cartes météo, conseils avisés pour l'atterrissage à Nouméa, pour les possibilités d'hivernage, nouvelles d'autres copains et plaisanteries diverses, nous attendions toujours l'heure de la vacation avec un plaisir certain.
Pimentée par des escales mémorables à Suva et à Maré, notre dure navigation nous a finalement menés à Nouméa. Le joli grain et le comité d'accueil qui nous attendaient à l'arrivée n'étaient qu'un prélude aux journées qui allaient suivre. Malgré le temps couvert, frais et venteux de rigueur pendant l'hiver calédonien, nous n'avons pas vu le temps passer. Balades dans l'île, courses diverses, plongées dans les coraux, sorties en hobby-cat, invitations de tous côtés, le programme était tellement chargé qu'il était difficile de préparer la longue étape suivante vers la Thaïlande que Bruno s'apprêtait à affronter en solitaire !