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La Naissance d'Ilboued : Un Rêve Devenu Réalité

posté les 13/09/1985 par Bruno vue(s)577

Dominique et Bruno Carénage du Trebez

Dominique et Bruno Carénage du Trebez

Dominique dans le carré du Trébez

Dominique dans le carré du Trébez

La Naissance d'Ilboued : Un Rêve Devenu Réalité

#CONSTRUCTION & ORIGINES

posté le 13/09/1985 par Bruno vue(s)577

C'était en 1985, et tout a commencé ainsi. Liée depuis très longtemps à la famille Paulet pour des raisons qui ne font pas partie de cette histoire, naviguant grâce à eux et avec eux depuis des années, cette petite lettre a ouvert pour moi des horizons de rêves. Nous nous sommes bientôt retrouvés à quatre pour étoffer le dossier ILBOED, rapidement transformé en ILBOUED après vérification dans un dictionnaire breton de l’orthographe exacte du mot.

 

Nous, c'est d'abord Dominique, initiateur du projet, architecte naval, passionné de mer, de bateaux, de mégalithes, de culture celtique, fumeur de pipe et père de Christophe et de Bruno (entre autres). C'est Christophe, à qui me lient beaucoup plus que des souvenirs de voyages et de fêtes, géophysicien en mission toujours à l'autre bout du monde, adorant la lecture, la mer, plutôt solitaire et fumeur de pipe. C'est Bruno, avec qui je partirai sans doute bientôt pour un plus long voyage, informaticien passionné, à qui pas grand-chose et peu de gens ne résistent, adorant la mer, les bateaux et la cuisine thaïlandaise, fumeur de pipe. Et c'est moi, Brigitte.

Je ne peux pas clore la présentation des acteurs sans parler d'Annick, femme de Dominique, mère de Christophe et de Bruno. Bien que non-copropriétaire en titre, elle a tellement été présente à toutes nos discussions, arrondi les angles, calmé les esprits, servi de chauffeur pour récupérer des équipages aux quatre coins de la Bretagne, servi de standard téléphonique qu'elle mérite une mention spéciale !

Mais revenons aux quatre principaux protagonistes : tous les quatre, nous avons beaucoup de points communs, en plus de la mer. Nous aimons boire et faire la fête, nous aimons le même genre de musique en général, de Bob Dylan aux chansons de marins, en passant par Gérard Manset et Léonard Cohen. Nous avions au départ des conceptions quand même proches de ce que serait ce bateau, plutôt confortable et solide, un endroit où vivre et être bien, marin et performant aussi bien sûr !

Il restait à mettre en forme ce beau projet. Je vous laisse imaginer les discussions réunissant quatre passionnés, têtus, possédant plus qu'un brin d'esprit de contradiction, à un stade où tout étant encore du papier, tout pouvait être imaginé. Les souvenirs de cette période sont déjà occultés par toutes les phases de réalisation du bateau, mais la salle à manger de Kérulvé a été le lieu de nombre de réunions de futurs copropriétaires. Les plans étalés sur la table, recouverts par les documentations des fournisseurs, elles-mêmes disparaissant sous les devis et le courrier des chantiers, le tout caché par la liste des points à voir à l'ordre du jour, répartition des tâches dont la priorité se trouvait chamboulée au gré des mois, les cendriers et les petits verres de liqueur, et les petits croquis griffonnés sur des tas de petits bouts de papier...

C'est bien sûr Dominique qui a été le maître d'œuvre dans toute cette affaire. Nous avons peu à peu et avec le canevas original décidé de ce que serait Ilboued, une goélette, en aluminium, coque à bouchains vifs, avec pavois, dériveur... La longueur du bateau fut fixée à 11,95 mètres, histoire de ne pas dépasser les douze mètres fatidiques pour le changement de réglementation pour les navires.

Il restait à préciser toutes ces options sur des plans détaillés, à trouver un chantier qui réaliserait la coque en aluminium, un chantier qui s'occuperait des aménagements, un moteur dont la taille et l'encombrement conditionneraient pas mal de choses, un voilier pour les voiles, et mille détails à regarder, renseignements à prendre et choix à faire...

Une fois les plans de forme de la coque établis par la SBERN, le cabinet d'architecture navale de Dominique, avec estimation et étude des performances du bateau, les choses se sont mises en place petit à petit. La répartition des tâches s'est faite au fur et à mesure, les dossiers et plans prenant forme après pas mal d'énergie dépensée à choisir dans les catalogues le matériel adéquat, à imaginer les pièces et systèmes pour la barre, la dérive, le gréement, le pilote automatique. Tout fut discuté et les options prises après vote des présents et consultation par courrier ou telex selon l'urgence de Christophe qui était le plus souvent absent.

L'aménagement intérieur fut imaginé et remanié : prévoirait-on un four, un chauffage, combien de couchettes, l'éclairage et le câblage électrique, la tuyauterie et les vannes, etc. Quelques points revenaient régulièrement, secondaires, mais importants, comme le couvercle des WC, accessoire important et gracieusement offert par Diwall (autre bateau de la famille), mais à qui malheureusement manquaient cet élément ; comme par la suite les coussins des couchettes. Étant donné que je suis le seul élément féminin de l'équipe, suivez mon regard et devinez à qui ce genre de préoccupation revenait. Je plaisante, mais à peine ; tout le monde, surtout les autres, a dépensé une énergie et un savoir-faire qui m'ont plus d'une fois impressionnée.

Bref, les choses se précisant de plus en plus, les devis arrivant finalement, on entra alors dans la phase négociations et décisions, sans pour autant fermer le volet études et dossiers qui resta ouvert encore longtemps ! Toujours grâce aux relations professionnelles de Dominique, le choix des chantiers fut assez simple. Il "suffisait" de comparer devis et délais. Le bateau sera donc fait à Saint-Malo, le chantier Richeux se chargeant de la réalisation de la coque, le chantier Labbé prenant à sa charge les aménagements intérieurs. Pour le gréement, nous nous tournons vers Victor Tonnerre, voilier bien connu de Lorient et ami de la famille Paulet qui accepte exceptionnellement pour nous de revoir son devis à la baisse après comparaison avec d'autres propositions que nous avions reçues.

Une réunion à marquer d'une pierre blanche réunit les quatre copropriétaires, le 17 janvier 1987. Les premières tôles étaient arrivées chez Richeux, il fallait maintenant nous organiser, commencer à investir encore plus sérieusement, et surtout financièrement, puisque les factures commençaient à arriver, et les commandes devaient être lancées. Bref, on commençait à parler fric, et nous avons voulu noir sur blanc discuter ensemble et signer ensemble un règlement de copropriété qui nous engagerait et éviterait les dérapages toujours possibles.

Dans le salon enfumé de chez Christophe, après moultes canettes et beaucoup de salive, il fut décidé que Bruno serait le trésorier du groupe, et un compte ouvert pour le bateau, et alimenté dès le lendemain 18 janvier par les divers participants. Les options de revente de sa part par un coproprio, ou d'un décès, ou du prêt du bateau à un tiers, etc., étaient également à l'ordre du jour. Mais le principal objet de la discussion fut l'établissement d'une formule cabalistique répartissant la part financière de l'entretien annuel du bateau pour chacun en fonction du nombre total de journées de navigation dans l'année, du nombre de jours de navigation de chacun, des frais fixes à envisager (assurance, frais de port, douane...) et des frais d'entretien. La formule au bout de trois ans est toujours en test et suscite de temps à autre des discussions animées. Mais ce jour-là, chacun a signé et est reparti avec son exemplaire du règlement.