Tripulante, c'est le joli nom dont est affublée toute personne à bord d'un bateau, hormis le capitaine, par les autorités locales rencontrées jusqu'ici (espagnoles et portugaises principalement).
Donc, la tripulante de l'Ilboued vous envoie son petit bonjour des Canaries et, pour rester dans un domaine qui lui est attribué, va aujourd'hui vous raconter un peu l'intendance du bord...
Des courses, des courses gigantesques avant de partir, on se demande ensuite comment tout ranger à bord, comment caser toutes ces boîtes, ces bouteilles, ces fruits, où ranger la moutarde, les câpres et les cornichons pour pouvoir les retrouver sans problèmes le jour du sandwich au pâté, où mettre tous ces pains et paquets de purée et de riz... Mais avec un peu de méthode et d'organisation, tout s'arrange et chaque chose trouve sa place.
Et puis partout, il y a red'autres courses, à Porto, à Lisbonne, à Madère, des marchés colorés, des petites boutiques, et encore des bouteilles, des fruits, des pains à restocker. L'important, c'est d'être vigilant, de guetter la réserve de lait qui diminue, les anchois qui arrivent en rupture de stock, les melons qui vont manquer pour accompagner le porto.
Au jour le jour, c'est le casse-tête des menus ; le repas, c'est un moment tellement important de la vie à bord. Et il faut faire preuve d'une imagination sans faille pour trouver la petite salade qui permet d'utiliser les tomates qui deviennent trop mûres, les pamplemousses à finir, le jambon qui se dessèche, la demi-boîte de conserve, ouvrir la veille qui va moisir si on ne l'utilise pas et les quarante façons d’accommoder le thon que l'on vient de pêcher et qu'il faut manger sans être lassé....
Quant au pain, il moisit, ou il se dessèche ! Les bananes elles, mûrissent toutes en même temps (mais même un peu trop à point elles restent délicieuses). Et il y a aussi tant de petits soucis annexes. Par exemple les poubelles : chaque jour on monte sur le pont un petit sac plein d'ordures, et on le met dans un gros sac dont on se débarrassera à la prochaine escale. Mais pour ne pas que le bateau se transforme en dépotoir, il faut avoir le réflexe de donner aux poissons et goélands tout ce qui est biodégradable, casser sans s'entailler les doigts les bouteilles et les canettes, et ne garder que les plastiques et papiers d'aluminium.
La lessive aussi devient encombrante quand on se promène dans ces îles paradisiaques où le lavomatique est inconnu, et que l'on entasse serviettes et torchons en attendant de trouver quelque part un peu d'eau douce pour tout rincer... Mais nous faisons face à l'adversité. Mon Bruno de capitaine n'a pas l'air d'avoir trop maigri, nous n'avons pas de boutons partout, et les visiteurs d'Ilboued n'ont pas l'air affolés par le désordre du bord.
Bien que camembert, ris de veau aux girolles ou lotte à l'armoricaine soient maintenant des souvenirs mythiques, nous découvrons les maracudjas, bacalhau, espadas, bolo de mel et tant d'autres mets exotiques... Et les soirs de nostalgie, nous faisons quelques crêpes, poulet au curry, ou saucisses frites en souvenir du pays....